Les éditos du Curé

La joie du don.

Pierre, Alban, Louis, Arthur. Ils seront 4 ce dimanche, en la cathédrale Saint Louis, à donner leur vie, à la consacrer au service de Dieu et du monde, à l’offrir pour œuvrer à notre salut.

La radicalité de ce don peut faire peur. Elle est pourtant à la mesure et du don de Dieu, et de la soif d’absolu présente dans le cœur de tout jeune. Offrir sa vie, donner sa vie : n’est-ce pas pour cela que nous sommes faits ? N’est-ce pas cette perspective qui peut nous aider à dépasser toutes nos faiblesses, nos craintes et nos doutes ? Henri d’Hellencourt, un jeune chef scout parti trop tôt, écrivait ceci dans son carnet, retrouvé après sa mort : « J’ai rêvé d’une grande vie, Seigneur. Mon erreur était de la vouloir grande pour moi. Elle sera grande si je la donne, si je vous la donne, pour que vous en fassiez ce qu’elle doit être… »

Quelque soit notre vocation, nous sommes appelés à la joie du don. Et tout ce qui apprend cette joie à un jeune, tout ce qui le prépare à se donner – comment ne pas penser ici au scoutisme, véritable école du don de soi et du service dans la joie – doit être encouragé. Au fond, c’est sans doute même le cœur d’une éducation : apprendre à son enfant que sa vie sera belle non si elle dure longtemps, mais si elle est d’une façon ou d’une autre donnée. Quand on a acquis cette certitude dès le plus jeune âge, alors on a moins peur quand l’heure arrive de dire « oui ». La perspective de tout donner ne nous paraît plus folle. On est même capable d’entendre le « Viens, suis-moi » que Jésus pourrait murmurer à notre cœur…

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Catho donc Ecolo !

Le Pape François vient de publier son Encyclique consacrée à l’écologie : « Laudato Si ».  Ce texte marquera la pensée chrétienne, comme Rerum Novarum l’avait fait pour la condition des ouvriers et Evangelium Vitae pour le respect de la vie. Une fois encore, le Pape se place du côté de la fragilité : celle de la terre, « notre maison commune » et celle des pauvres, premières victimes de la crise écologique.

Il nous faut lire cette encyclique. En prendre le temps et en faire l’effort. Un catholique ne peut se désintéresser de ce que dit le Pape. Et celui-ci ne publie pas une telle encyclique tous les ans ! Elle n’est pas plus difficile d’accès que les livres qu’on donne à lire aux lycéens en cours de français. Ce Pape parle simplement, avec son cœur et avec « ses tripes » si vous me permettez l’expression.

Le Pape a deux objectifs. Il veut nous réveiller sur la gravité de la situation : « quel genre de monde voulons-nous laisser à ceux qui nous succèdent, aux enfants qui grandissent ? ». Il veut nous faire aussi comprendre que seule une « écologie intégrale » peut répondre à cette question, car tout est lié : « Quand on ne reconnaît pas, dans la réalité même, la valeur d’un pauvre, d’un embryon humain, d’une personne vivant une situation de handicap – pour prendre seulement quelques exemples – on écoutera difficilement les cris de la nature elle-même. Tout est lié ».

Les chrétiens sont appelés à être aux avant-postes de cette « conversion écologique » que le Pape appelle de ses vœux. Cette conversion s’incarnera au quotidien, aussi bien dans le style de vie – « une sobriété libératrice » face au « consumérisme compulsif » –  que dans nos relations aux autres –  le refus de la « culture du déchet » qui touche d’abord la nature puis les personnes –  que dans notre vie spirituelle, en nous invitant à renouveler notre regard de foi  sur cette terre qui n’est pas notre propriété, mais un don de Dieu dont nous sommes les gardiens.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Une ambition qui rend libre.

Saint Paul a cette belle expression que nous pouvons méditer : quoiqu’il se passe, qu’il ait à vivre encore un peu, ou qu’il meurt bientôt comme il l’espère, pour demeurer près de Dieu, « notre ambition, c’est de plaire au Seigneur. »

Faire la joie de Dieu. Voilà une belle ambition, libératrice.

Elle me libère du regard des autres. Dieu seul est mon juge. Dieu seul sait tout. Et Dieu est infiniment juste. Chercher à plaire aux autres est épuisant : nous ne serons jamais satisfaits pleinement, et nous risquons de ne pas être nous-mêmes. Attention : faire la joie de ses amis est une chose. Chercher à plaire à tous en est une autre. Le Christ lui-même a vu les foules se détourner, sans que cela ne le fasse renoncer à ce qu’Il avait à proclamer.

Elle me libère de moi-même. Vivre ma foi, centré sur mon nombril, mes humeurs, mes ressentis, etc… ne va pas m’offrir une grande stabilité, tant tout cela est bien fluctuant. Me centrer sur la joie de Dieu m’offre un cap qui ne bouge pas. En toute circonstance, c’est un critère qui fonctionne : Qu’est-ce que Dieu attend de moi ? Comment puis-je faire sa joie ? Même si à ce moment-là, je suis – moi – plutôt dans la peine. Ce sera même une consolation possible : être resté généreux à travers l’épreuve que je traverse, en m’occupant de la joie de DIEU.

Elle me libère de toute inquiétude. Quoiqu’il arrive, je peux encore faire la joie de Dieu. Si c’est mon ambition, alors je ne serai jamais frustré. Que je vive ou que je meure demain, au fond, cela ne modifie pas vraiment ce qui importe pour l’instant présent : faire sa joie, aujourd’hui et maintenant. Découvrir que je peux être une joie pour Dieu, tel que je suis. Même le plus grand pécheur peut l’être, en se laissant pardonner et aimer. Là encore, c’est une consolation : j’ai du prix à ses yeux, puisque je peux être une joie pour Lui. Faire la joie de Dieu fera notre joie.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Présence réelle

C’est un des mystères les plus profonds de notre foi catholique. Jésus se rend réellement présent, entre les mains du prêtre, au cours de la consécration. Si les apparences du pain et du vin demeurent, la substance est transformée. Ce n’est plus du pain ni du vin. C’est Jésus, son Corps, son Sang, son Âme et sa Divinité. L’enfant de la crèche, le jeune apprenti de Nazareth, le prédicateur des routes de Galilée, le crucifié du Golgotha, le ressuscité… Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai Homme, est là. Il se rend présent dans cette église de Saint-Cyr l’Ecole. Une parcelle d’hostie, quelques gouttes de vin suffisent. La voix et les mains d’un prêtre, aussi faible soit-il. Au cœur d’un camp de concentration, ou sous les ors d’une cathédrale. Jésus vient. Pas symboliquement. Pas uniquement spirituellement. Il vient réellement. Pour toi.

On n’aura de cesse de contempler ce mystère. Notre intelligence ne peut que se mettre à genoux. Elle se débat : comment est-ce possible ? Adore en silence ! Apprends à contempler, laisse-toi enseigner, accueille cette vérité que l’Eglise te confie, comme un trésor. Laisse Jésus lui-même te faire comprendre qu’Il est là. Qu’Il t’attend au tabernacle. Qu’Il vient pour se donner, pour que tu ne fasses plus qu’un avec Lui. Et surtout, n’oublie pas. Ne t’habitue pas. Que tes gestes d’adoration, que ta tenue, disent ta foi, soutiennent ta foi, et ne soient jamais vides ou qu’extérieurs. « Que les gestes de ton corps soient le langage de ton cœur » disait Jean-Paul II aux amoureux. Qu’ils soient aussi le langage de ta foi, et de cet amour que tu veux avoir pour Jésus. Il est là…

Père Pierre-Hervé Grosjean +

BIENVENUE SAINT-JOSEPH !

L’événement de cette semaine, pour la paroisse, est la bénédiction de la nouvelle statue de Saint Joseph, en cette fête de la Sainte Trinité. Un cantique ancien évoquait la Sainte Famille comme « la petite trinité sur la terre » … nous voilà heureux qu’elle soit désormais réunie et présente dans le chœur de notre église paroissiale. Jésus, Marie, Joseph : famille bénie mais aussi éprouvée ; école de foi, de générosité et de service. Saint Joseph, de lignée royale – il est de la maison du Roi David – et pourtant simple artisan de Nazareth. Il honore Dieu par sa vertu, sa foi et son travail, dans une vie simple et modeste. Fiancé plein de respect, il apprend à aimer Marie. Cette vie « ordinaire » va être bousculée par la révélation du choix de Dieu. Joseph se met au service du projet de Dieu, de la vocation de Marie, de la mission de Jésus. Sa force, son courage, son savoir-faire, ses talents : tout est donné pour protéger, accompagner, servir et aimer le Sauveur et sa Mère. Joseph n’est pas un bavard, il agit et se montre fidèle. Modèle d’une sainteté en actes, qui ne brille pas aux yeux du monde mais rayonne plus profondément. Une sainteté nourrie de prière, de cette proximité avec Jésus.

Saint Joseph, je vous confie les familles, les couples, les fiancés de la paroisse ! Je vous confie les pères de famille, et leurs fils en particulier. Que les uns préparent les autres à cette grande mission de père et d’éducateur. Que nos garçons grandissent pour cela avec un cœur pur et généreux, libres de toute paresse et pleins de courage !  Je vous confie aussi ceux et celles qui travaillent, ou cherchent du travail. Saint Joseph, je vous confie toute notre paroisse : apprenez-nous la joie de servir humblement et fidèlement à la place où Dieu nous a appelés.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Comprendre, agir, transmettre

Aux jeunes de 3ème préparant leur confirmation, je n’ai cessé de répéter ces trois mots tout au long de l’année et de leur retraite, pour leur expliquer l’action de l’Esprit Saint. Peut-être n’est-ce pas inutile, même pour ceux qui sont déjà confirmés, d’y revenir ? Combien d’entre nous sont à l’aise pour expliquer l’Esprit Saint, son rôle et sa manière d’agir ? Il reste souvent le « grand inconnu » de la Trinité !

« L’Esprit de vérité vous conduira dans la vérité tout entière » promet Jésus. L’Esprit Saint vient nous éclairer pour nous faire comprendre ce que nous sommes : enfants du Père. Des enfants blessés, mais pardonnés et sauvés par le Fils, désormais frères de Jésus Christ.

L’Esprit Saint agit en nous pour nous rendre capables de vivre selon ce que nous sommes. C’est lui qui vient nous rendre fervents, qui ravive en nous cet amour de Dieu qui nous rend capable de nous dépasser, de nous donner vraiment, au delà de nos faiblesses. Il nous donne la force d’agir selon notre dignité d’enfants de Dieu, y compris face aux tentations. Comme une boussole intérieure, Il nous conseille et nous aide à garder le cap de notre vocation.

L’Esprit Saint nous embrase du désir de transmettre. Il agit en nous pour nous donner la force des apôtres, leur courage et leur audace. Il met sur nos lèvres les mots justes pour annoncer le Salut offert à tous. A travers les pauvres que nous sommes, Il permet que la Bonne Nouvelle se répande dans les cœurs qu’Il rend disponibles.

Il ne reste qu’une seule résolution à prendre : ne plus oublier de prier l’Esprit Saint, explicitement ! C’est une des Personnes de la Trinité. Nous pouvons Lui parler, l’invoquer, avec par exemple les mots si beaux du « Veni Sancte Spiritus », la séquence que nous lisons ce dimanche avant l’évangile.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« Le monde les a pris en haine »

Jésus, au soir du Jeudi Saint, parle une dernière fois avec ses apôtres réunis autour de lui. L’ambiance est grave et l’émotion est grande. Il leur transmet son testament, que Saint Jean rapporte fidèlement dans les chapitres 14 à 17 de son évangile. Des pages à méditer sans se lasser. Au cœur de cet échange, le Christ s’interrompt et rentre en prière. A voix haute, il se met à parler à son Père et prie pour ses disciples et pour tous ceux qui viendront après eux. Jésus a prié pour nous au seuil de sa Passion.

C’est dans le contexte de cette prière qu’il a ces mots, parlant de ses fidèles : « Le monde les a pris en haine ». Ce sont des mots qui peuvent nous choquer. Pour Saint Jean, ce « monde » n’est pas la création voulue par Dieu, ni même les hommes, créatures de Dieu, mais un certain esprit du monde, une certaine culture ou mode de vie opposé à Dieu. Un monde qui se voudrait sans Dieu, révolté contre son Créateur ; « une culture de mort » disait Jean-Paul II. Les chrétiens au cœur de la vie de ce monde sont les témoins de l’existence de Dieu. Ils rappellent au monde qu’il ne s’est fait pas tout seul. Ils rappellent à tous notre état de créature. C’est insupportable à entendre, quand on veut « être comme des dieux » selon la promesse du Démon.

Voilà pourquoi le chrétien sera toujours un signe de contradiction pour le monde, en raison du message qu’il porte, rempart précieux contre le désir de toute puissance. Jésus ne veut pas que les chrétiens se retirent du monde, mais les y envoie au contraire, car ce témoignage est un service offert à tous. Tout en nous assurant que nous ne sommes pas seuls: « Courage, j’ai vaincu le monde »…

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« Il n’y a pas de plus grand amour… »

… que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » explique Jésus à ses apôtres, au soir du Jeudi Saint, comme pour leur donner la clé de compréhension des évènements dramatiques qui vont se dérouler dans les heures qui suivront. Toute la passion du Christ est un immense acte d’amour. C’est cet amour, au cœur même de la souffrance, et non la souffrance par elle-même, qui nous sauve.

Cela éclaire aussi le sens de toute vie donnée à la suite du Christ. Un père, une mère sait combien sa vie ne lui appartient plus vraiment. En se mariant, en accueillant des enfants, on choisit de ne pas vivre sa vie pour soi. On la donne. Il en est de même pour tous ceux qui – malgré leur célibat non choisi ou leur solitude – mettent leur vie « au service », en prenant soin des autres. Enfin, c’est le secret du bonheur des consacrés. La vocation religieuse ou sacerdotale n’est pas un renoncement à aimer, mais bien une autre façon d’aimer pleinement. Le cœur d’un prêtre, d’une religieuse, d’un moine n’est pas « verrouillé ». Il est donné. Au Seigneur Jésus, de façon unique et particulière. Aux autres, de façon pleine et entière. C’est l’amour qui fait entrer au monastère ou au séminaire. C’est par amour, et non par sacrifice, qu’on dit « oui ». C’est l’amour qui porte et donne du sens aux renoncements. De la sorte, ils ne sont pas vécus comme des frustrations. Nous sommes tous faits pour aimer, d’une façon ou d’une autre. Nul ne doit y renoncer. Notre vie sera belle si elle est donnée.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« A vous d’en être les témoins ! »

Ce sont par ces mots que Jésus conclut son apparition à ses disciples, après les avoir aidés à relire ces trois années passées ensemble, à la lumière de la Résurrection. Il nous fait comprendre ainsi notre place dans le plan du Salut : Jésus a donné sa vie pour nous sauver, il a obtenu ce salut offert à tous. Il a réalisé – et lui seul pouvait le faire – notre rédemption. Mais il nous laisse maintenant le soin d’en faire profiter le plus grand nombre.

Etre témoins de cet amour de Dieu pour le monde, et de son salut offert à tous, ne veut pas dire être parfait, mais déjà plus simplement commencer par se laisser sauver ! Nous ne sommes pas meilleurs que ceux qui ne connaissent pas Dieu, mais nous nous savons aimés et pardonnés. A nous de laisser la grâce agir dans notre vie, et de montrer ainsi ce qu’elle pourrait faire dans la vie de chacun. C’est en cela que nous pouvons être « exemplaires » : à travers nous, donner au monde des exemples de pécheurs pardonnés et sauvés !

C’est au fond une belle raison de notre persévérance dans la foi : même et surtout à travers nos relèvements, nous sommes témoins de la puissance de la Résurrection et de la victoire de Jésus sur le mal. Ayons à cœur simplement d’en être des témoins explicites… et joyeux !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Saint Thomas et la promesse.

Etait-il vexé de ne pas avoir été présent, quand Jésus était apparu aux apôtres ? Avait-il été tant ébranlé par les évènements de la Passion, qu’il ne pouvait accepter cette bonne nouvelle ? Toujours est-il que Thomas refuse catégoriquement de croire le témoignage de ses compagnons. Incapable de se réjouir et de s’ouvrir à cette bonne nouvelle, il s’enferme dans son refus et sa tristesse. Il est déçu : déçu de lui, qui n’a pas été à la hauteur, on ne l’a pas vu au pied de la croix. Déçu de Jésus peut-être ? Il pensait suivre le Messie, le Sauveur, et celui-ci a terminé sur cette croix, comme un criminel… Déçu après avoir beaucoup espéré, mais sans doute en se trompant de fondements pour cette espérance.

Jésus se montre bienveillant et patient avec Thomas. Il revient, et lui offre le privilège d’une nouvelle apparition. Mais l’important n’est pas là. L’essentiel est la promesse que Jésus a faite à cette occasion : « Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu ». Jésus pense à nous. Il sait qu’il sera souvent difficile de croire. Notre foi sera souvent éprouvée par les évènements, les tentations ou le doute. Jésus proclame dès maintenant « bienheureux » – c’est-à-dire leur ouvre les portes du Ciel – ceux qui choisiront envers et contre tout de lui faire confiance, et d’accueillir le témoignage des apôtres, transmis par l’Eglise. Que ce temps de Pâques nous donne de re-choisir de croire… notre joie en dépend !

Père Pierre-Hervé Grosjean +