Les éditos du Curé

Qu’as-tu fait de ce que tu as reçu ?

Il faut voir un vigneron prendre soin de sa vigne. Il ne compte pas ses heures de travail, il soupèse les grappes de raisin, espérant une belle récolte, s’enthousiasmant déjà du bon vin qu’il en fera… Depuis trois dimanches, Jésus utilise cette image pour nous enseigner. Le peuple de Dieu est la vigne dont le Seigneur prend soin. Il se désole quand elle donne de mauvais fruits. Ou encore, comme la semaine dernière, Jésus parle de nous comme les vignerons que le Maître de la vigne envoie au travail. Il nous a confié une vigne : l’Eglise, l’Evangile, le Salut… pour que nous en prenions soin. Aujourd’hui, il évoque ceux qui ont voulu se l’approprier, jusqu’à tuer le fils du Maître de la vigne…

Qu’as-tu fait de cette vigne que tu as reçue ?

C’est à la fois ta vie, ta liberté, tes talents, ta famille, ta capacité d’aimer… Tous les trésors que Dieu a mis en toi en te créant. Qu’en fais-tu ? La tentation d’oublier que tout cela t’a été donné et confié pour servir est grande. On se met vite à la place du Maître…

C’est aussi ta foi, encore un don de Dieu. Qu’en fais-tu ? Porte t’elle de beaux fruits ? La travailles-tu ? Et ta vocation dans ce monde ?

C’est l’Eglise, qui t’est aussi confiée, à toi baptisé. Ta famille spirituelle. Tes frères et sœurs dans la foi. Comment la sers-tu, cette vigne, pour qu’elle apporte le Salut à tous ? Comment t’impliques-tu dans ta paroisse, cette petite portion de l’Eglise Universelle ? Tu en es aussi responsable. Dans l’Eglise, nul n’est simplement « consommateur ».  Tous sont appelés à travailler à la vigne, chacun avec ce qu’il est.

C’est enfin ce monde, et plus précisément le bien de ce monde, c’est-à-dire le Bien commun. L’engagement désintéressé pour défendre et promouvoir les fondements de ce bien commun, de la dignité de tous. N’oublie pas cette vigne-là… même si le travail y est souvent difficile.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La Paroisse dans notre vie chrétienne.

A la lumière des lectures de ce jour, nous pourrions méditer sur le rôle de la paroisse dans notre vie chrétienne.

La paroisse est d’abord un lieu de conversion et de salut. J’y viens pour rencontrer Dieu, le servir et le recevoir. Pour cela, il me faudra aussi obtenir son pardon, et me laisser purifier. Ce n’est pas un hasard si tout près de l’entrée, il y a le confessionnal ! La miséricorde m’introduit auprès de Dieu.

La paroisse est un lieu où se recherche et se vit l’unité. Le catholique doit faire cette double expérience : découvrir qu’il a sa place dans l’Eglise, tel qu’il est. Découvrir en même temps qu’il n’est pas catholique tout seul, ou « à sa sauce », mais qu’il appartient à une famille plus large qu’est l’Eglise. De cette famille, il reçoit les mots pour dire la foi et pour prier. C’est à la paroisse, dans la liturgie, qu’on fait cette double expérience, sous la responsabilité du curé. On apprend à aimer l’Eglise telle qu’elle est, en vivant une réelle unité dans la diversité.

La paroisse enfin est un lieu d’exercice de la charité. Les paroissiens sont des frères dans la foi que Dieu me donne à aimer, à servir, à porter. Nous sommes invités à nous encourager mutuellement, dans les joies comme dans les peines, sans jamais désespérer de tel ou tel. Notre paroisse n’abandonnera jamais l’un des siens.  Même les paroissiens défunts demeurent dans notre prière, dimanche après dimanche… l’esprit de famille perdure, par delà la mort.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Bienheureux ouvrier de la dernière heure !

Notre sens de la justice sociale ne peut qu’être ébranlé par l’évangile
du jour. Pour que l’ordre et la paix règnent, il faut que tous soient traités de façon juste. Or cette idée saugrenue du Maître de rétribuer autant l’ouvrier de la dernière heure que celui qui a peiné toute la journée ne semble pas aller dans ce sens, et ressemble même à une provocation.

Qu’est-ce qui nous choque ? Qu’il ait trop ? Ou que le premier n’ait pas assez, même s’il a ce qui était convenu ? Pourquoi la bienveillance généreuse du Maître nous choque-t-elle ? Elle nous semble même dangereuse, tant elle risque de remettre en cause les règles et contrats établis, la coutume … Pourquoi avoir du mal à se réjouir du bonheur de l’autre, alors que j’ai ce qu’il me faut pourtant ?

Mais posons-nous une autre question : pourquoi instinctivement nous mettons-nous du côté de l’ouvrier de la première heure ? Ne serions-nous pas plutôt celui que le Maître a attendu longtemps, celui dont Il a espéré longtemps un amour véritable et fort ? Celui qui a mis du temps – toute une vie peut-être – pour croire et aimer, servir et se donner, à la hauteur des attentes du Seigneur ? Et dans ce cas, cette miséricorde du Maître, si nous nous en découvrons les premiers bénéficiaires… nous choque-t-elle encore vraiment ?!!

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La Croix et la Gloire

Il n’y a que la foi chrétienne pour oser rapprocher ces termes. L’instrument de torture est devenu l’instrument de la victoire sur le mal. Le jour de tristesse et d’effroi – terrible vendredi saint – a vu s’ouvrir les portes du Paradis. La mort est devenue l’entrée dans la Vie.

Nous vivons cette expérience à notre tour, si nous acceptons de suivre Jésus. C’est quand nous nous reconnaissons pécheurs que nous sommes relevés. C’est quand nous acceptons de nous donner que nous trouvons la joie. C’est quand nous nous mettons à genoux devant les plus petits pour les servir, ou devant Dieu pour le prier, que nous sommes grands. C’est quand nous nous laissons humblement aider que nous sommes forts… On pourrait continuer ainsi la litanie de toutes nos petites ou grandes croix, de nos petites ou grandes morts, de nos petits ou grands abaissements et offrandes de nous-mêmes, consentis plus ou moins joyeusement, parfois douloureusement. Nous y découvrons à chaque fois une fécondité mystérieuse mais réelle, quand tout cela est vécu avec Jésus, à la lumière de sa croix désormais glorieuse.

La croix reste la croix. Nos épreuves sont de vraies épreuves. La gloire de la croix ne relativise pas la croix, ne la diminue pas. Elle nous en rappelle simplement la fécondité, et la Victoire à laquelle elle est pour toujours liée.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Etre saint au boulot ?

En ces jours de rentrée, il n’est pas inutile de méditer à nouveau sur notre « devoir d’état ». L’expression n’est peut-être pas très motivante, mais ce qu’elle veut dire l’est beaucoup plus !
Saint Josémaría expliquait : « la sainteté, c’est faire ce que je dois, et être à ce que je fais ». Nous ne plaisons pas à Dieu seulement quand nous prions ou quand nous sommes à l’église. Nous faisons la joie de Dieu quand nous faisons ce qu’Il attend de nous dans l’heure qui vient. Travail, études, détente, temps entre amis, services à la maison, prière, sport, œuvres de charité… au fond qu’importe ! Tout peut plaire à Dieu, si nous faisons ce que nous avons à faire, et si nous nous donnons vraiment dans ce que nous faisons. Etre là où Dieu nous attend – à notre bureau, à la maison, à l’église… –  mais y être vraiment, en faisant de notre mieux. La fidélité au « devoir d’état » est le chemin le plus simple, le plus quotidien pour être un saint ! Ainsi même les tâches les plus ordinaires ont du prix aux yeux de Dieu, si elles sont accomplies par fidélité, c’est-à-dire au fond par amour.  Bonne rentrée !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Une fidélité qui nous interpelle.

Nos frères chrétiens d’Irak ont été au cœur de l’actualité cet été, en particulier grâce au voyage effectué sur place par le Cardinal Barbarin. Depuis leur situation s’est dramatiquement aggravée, mais désormais plus personne n’ignore le drame qui se joue là-bas. Nous n’oublions pas non plus nos frères de Corée du Nord, de Chine, d’Egypte, du Nigéria, des pays du Golfe Persique… persécutés derrière un mur de silence.

Que cela peut-il nous inspirer, au seuil de cette rentrée scolaire ?

Bien sûr, nous savons l’importance de la prière. Nous croyons que nos prières peuvent les porter. Nous savons aussi leurs besoins matériels, pour ceux qui sont sur les routes de l’exode. Mais allons plus loin…

Le Cardinal Barbarin disait son émotion de voir que pas un seul chrétien de Mossoul n’avait renié sa foi. Pas un seul n’avait accepté de se convertir pour sauver ses biens, face à l’ultimatum imposé par les djihadistes. Leur fidélité nous impressionne. Elle doit aussi nourrir, entraîner, provoquer la nôtre, et nous aider à reprendre conscience de la grâce qui nous est faite de pouvoir vivre notre foi librement. Choisissons du coup de ne pas la vivre à moitié cette année. Ce sera la plus belle consolation à offrir à tous nos martyrs : « votre sacrifice n’a pas été vain. Il a porté du fruit, en réveillant l’occident attiédi, en éveillant nos cœurs endormis »

Pour eux, entrons avec courage et ferveur dans cette nouvelle année scolaire, en choisissant de vivre avec générosité nos engagements et notre vie spirituelle. Bonne reprise !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« Je vous procurerai le repos »

Voilà une bonne résolution pour votre curé et ceux qui auront la chance d’avoir quelques vacances cet été : se reposer ! Ça peut sembler paradoxal. Après tout, il ne devrait pas être bien difficile de se reposer. Pourquoi en faire une résolution ? Tout simplement parce qu’on peut passer des vacances… épuisantes ! A force d’activités de détente qui se succèdent les unes aux autres, par peur de s’ennuyer, ou de couchers tardifs, ou d’abandon complet ou partiel de toute vie spirituelle !

La première des charités est pourtant de prendre soin de soi. Non par égoïsme, mais pour rester capable de servir et de se donner. On a besoin de se reposer, de prendre le temps de relire son année, de méditer ses projets, de se renouveler intérieurement dans la prière. Ceux qui comptent sur nous seront les premiers à se réjouir de nous voir revenir « en forme » !

C’est aussi une question d’humilité. Ne pas se croire au-dessus de ça. Accepter d’avoir besoin de se poser. Nul n’est indispensable. La terre continuera de tourner pendant nos siestes, notre temps de retraite ou votre WE de couple en amoureux !

C’est enfin un désir de Jésus. « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. ». Il attend avec impatience ces temps d’intimité que nous prendrons dans le silence avec Lui. Il saura nous restaurer, nous renouveler, nous préparer à repartir de plus belle, pour servir et aimer. Bonnes vacances reposantes à chacun, en communion de prière.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Que notre joie demeure

Ce dimanche, en la fête des saints Pierre et Paul, notre diocèse aura
la joie de compter 7 nouveaux prêtres, dont l’abbé Jean-Baptiste Bellet, qui nous fait l’honneur de célébrer une première messe mardi dans notre paroisse.

D’une génération à l’autre, la joie demeure.

Bien sûr, nous pourrions redire combien les chiffres ne sont pas bons
(82 prêtres diocésains ordonnés cette année en France), et nous remettre en cause : les vocations naîtront et grandiront là où la foi est vivante, là où l’on prie pour avoir des prêtres, là où l’on se sert du prêtre pour ce qu’il est.

Mais avant cela, il nous faut surtout et toujours témoigner, en particulier auprès des plus jeunes, de notre joie d’être prêtre. De l’ancien qui vaillamment use ses dernières forces pour célébrer la messe, car il sait qu’il ne sera pas remplacé, au jeune ordonné plein d’idéal et de générosité, en passant par le prêtre dont la joie s’est mêlée d’un peu de gravité, car quelques années de service lui ont suffi pour côtoyer les épreuves, les joies et les malheurs de son peuple, une chose demeure : la joie d’avoir tout donné, pour un Autre, pour les autres. La joie d’être prêtre pour vous et avec vous. Que cette joie soit contagieuse, qu’elle résonne comme un appel dans les cœurs de nos jeunes !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Comment communies-tu ?

« Lex orandi, lex credendi » : la loi de la prière, c’est la loi de la foi : dis-moi comment tu pries, je te dirai ce que tu crois. S’il y a bien un sujet sur lequel cet adage est juste, c’est dans notre façon d’adorer et de recevoir Jésus-Eucharistie.

La Fête-Dieu est l’occasion pour nous tous de retrouver la ferveur et l’attention du jour de notre première communion, pour nous approcher de l’autel et recevoir Jésus. Rien de plus triste que l’habitude en ce domaine. Bien sûr, Jésus ne se réserve pas aux gens parfaits. « Seigneur, je ne suis pas digne ! … ». Mais justement, parce que nous savons que Dieu se donne bien au-delà de nos mérites, nous avons à cœur de le recevoir de notre mieux. La beauté des gestes, des attitudes, du recueillement : tout cela porte notre foi. Notre façon de communier révèle-t-elle notre foi profonde en la présence réelle de Jésus ? Notre désir de communier, et le sérieux pour nous y préparer, révèlent-ils notre amour pour le Seigneur ?

Nous le devons au Seigneur en premier lieu. Mais aussi à tous nos frères qui ne peuvent communier. Les malades, les personnes isolées, le chrétien persécuté obligé de se cacher, celui qui humblement ne se sent pas prêt, ou en est empêché… Vis-à-vis d’eux, nous ne pouvons communier avec légèreté, habitude, insouciance. Soignons en particulier ce temps de procession pour aller communier, et ce temps d’action de grâce juste après. Temps de silence profond, d’ultime préparation, puis de joie intérieure, de gratitude que nous prenons le temps d’exprimer.

Un vieux prêtre me disait : « célèbre ta messe comme si c’était la première, comme si c’était la dernière ». A sa suite, je « nous » dis à tous : « communie, comme si c’était ta première communion, comme si c’était la dernière… »

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Avons-nous tous le « même » Dieu ?

Le désir d’établir des relations fraternelles entre les différentes religions, la résistance commune aux assauts d’un athéisme militant, la faible connaissance réciproque, le peu de formation dans sa propre foi, peuvent nous amener assez facilement à affirmer que nous avons tous le même Dieu, mais que chaque religion offre un chemin différent.

Cette affirmation est équivoque, car tout repose sur le sens que nous donnons au mot « même ». Il peut avoir deux sens : unicité et identité. Dans le premier sens, nous pouvons dire qu’effectivement nous croyons en un Dieu unique numériquement. Dans le deuxième sens, il est absolument impossible de dire que nous avons le même Dieu que les autres.

Pourquoi ? La fête d’aujourd’hui et les lectures l’illustrent bien : nous croyons en un Dieu-Trinité. Trois personnes distinctes mais possédant la même nature divine. Nous croyons que l’une d’elles est venue dans ce monde mourir sur une croix pour nous sauver. Nous croyons que le Très Haut s’est fait le tout proche. Nous croyons en Dieu tel qu’Il s’est révélé de façon unique en Jésus-Christ « LE Chemin, LA Vérité et LA Vie », et non un des chemins, ou une vérité parmi d’autres.

Voilà pourquoi nous ne pouvons pas prier ensemble ni partager nos lieux de culte. Mais nous pouvons être ensemble, et prier chacun selon sa foi, comme l’ont fait le Pape et les présidents israéliens et palestiniens. Croire en l’unicité de la Révélation divine, qui affirme que Dieu a parlé par l’Ecriture et la Tradition, et non par les textes des autres religions, ne nous empêchera pas de respecter la démarche des croyants de ces autres religions. Le relativisme ne sert pas le dialogue, il le rend impossible, en empêchant chacun d’être pleinement en vérité avec sa foi.

Père Pierre-Hervé Grosjean +